samedi, 7 décembre 2024
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Irrigation des palmeraies : savoir de quoi on parle

Cet article n’est pas une publication scientifique mais une publication d’ingénieur de développement dont la mission est d’utiliser des techniques connues, éprouvées et robustes pour mettre en œuvre des projets qui seront gérés localement.

Par Régis Jourdan et le Docteur Mohamed Bouchentouf (*)

Nous allons donc passer en revue toutes les étapes d’étude de projet et faire une analyse critique de ce qui a pu être écrit sur l’irrigation des palmeraies, étape indispensable de retour d’expérience (benchmarking) à laquelle l’ingénieur doit procéder.

Il fait suite à une étude de projet d’irrigation de palmeraies en pays hyperaride (Arabie Saoudite), où nous avons été amenés à constater la réalité de terrain au sein d’une palmeraie (Al Ula) et aux travaux réalisés sur la ferme expérimentale « La Clef des oasis » de Timimoun, oasis située au cœur du Sahara algérien, dont le directeur est le co-auteur de cette publication.

Après avoir effectué un tour d’horizon bibliographique des publications scientifiques sur l’irrigation des palmiers dattiers, le constat effectué, est que peu d’études ont été consacrées à ce sujet alors que la datte constitue une base alimentaire séculaire du milieu oasien.

Suite à un colloque international sur le palmier dattier réalisé en Algérie au printemps 2022, on note qu’il y a un consensus pour dire que le palmier dattier reçoit en moyenne de 90 à 110 m3/an/arbre (nous voyons des études prétendre qu’on peut descendre à 70 m3/arbre/an et même au-dessous en pratiquant l’irrigation déficitaire) mais on ne sait pas dire s’il reçoit ce dont il a besoin et comment on a mesuré ces valeurs.

Partiteur de débit dit « peigne » au sortir de la foggara. Photo Diasporadz

Partiteur de débit dit « peigne » au sortir de la foggara

En effet la plupart des installations d’irrigation de palmeraies ne sont pas équipées de systèmes de mesure des volumes (compteurs d’eau, débitmètre, seuil déversoir de mesure sur canal, bassin tampon…), soit parce qu’il s’agit de systèmes gravitaires ancestraux de captage de l’eau (foggara, qana…) où la distribution d’eau se fait au tour d’eau ou par des partiteurs (cas des peignes de foggara) et payée forfaitairement à la surface irriguée, soit parce qu’il s’agit de systèmes modernes de pompage dans une nappe phréatique –généralement fossile – et le propriétaire privé ne se soucie pas du volume d’eau puisqu’elle est gratuite et non facturée.

La facture énergétique à payer au réseau électrique distributeur peut contribuer à mesurer indirectement les volumes à condition de connaître la puissance de la pompe installée (généralement pompe immergée) et son débit. Cette approche se complique lorsque le compteur électrique dessert une habitation ou plusieurs utilisateurs. Donc la plupart du temps il faut repartir sur une estimation du débit au départ de l’installation et multiplier par le temps d’irrigation par saison.

Forage traditionnel non équipé de compteur volumétrique. Photo Diasporadz

Forage traditionnel non équipé de compteur volumétrique

Lorsque le système d’irrigation passe par un bassin de grande dimension permettant de stocker la dose d’eau à distribuer à la parcelle et que son alimentation est pilotable (tour d’eau, pompe à déclenchement manuel), connaissant les temps de fonctionnement du système d’alimentation en eau et la fréquence d’irrigation, on peut avoir une approche des volumes distribués mensuellement et, dans un deuxième temps vérifier si cela correspond aux besoins calculés.

Bassin de stockage et départ des canalisations d’irrigation. Photo Diasporadz

Bassin de stockage et départ des canalisations d’irrigation

La modernisation des systèmes d’irrigation avec distribution de l’eau en conduite PEHD et la mise en place de canules remplissant une petite couronne en terre placée autour du tronc, permet de mesurer le débit d’eau en extrémité de canule ; ce système de mesure est cependant altéré par le fait que le débit des canules n’est pas régulier sur la ligne compte tenu des pertes de charge ; en effet seuls les systèmes pressurisés autorégulants en pression (cas des goutteurs autorégulants fonctionnant dans une plage de pression indiquée par le constructeur) assurent une fiabilité de débit à chaque distributeur ; sur une ligne, le débit des canules ne sera donc pas le même selon la localisation de la prise considérée.

Irrigation par canule et petit bassin autour du tronc. Photo Diasporadz

Irrigation par canule et petit bassin autour du tronc

Nous avons pu constater que ces approches de mesure indirecte des volumes conduisent sur un même site de projet à des estimations de volumes distribués dans une palmeraie variant entre 20 000 et 30 000 m3/ha/an.

La plus grande prudence s’impose dans ces évaluations et leurs conclusions. L’examen des publications scientifiques, montre que certains auteurs érigent des règles générales à partir de cas spécifiques ou remettent en question des modes de calcul des besoins en eau à partir des formules préconisées par la FAO, largement utilisées dans le monde.

Il faut faire preuve de rigueur, de sagacité et de patience pour mesurer des impacts. Par exemple tel auteur omet de spécifier dans une expérience de rationnement de l’eau (ou d’irrigation déficitaire) s’il y a ou non une nappe perchée à faible profondeur.

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Nul ne peut ignorer que les palmeraies sont de plus en plus habitées en raison du confort climatique apporté par « l’effet oasien ». Or, peu de ces habitations sont raccordées à un réseau collectif d’assainissement. Le système fonctionne avec des fosses septiques et des drains d’épandage ou avec un rejet pur et simple des eaux usées dans les fossés d’assainissement. Cette eau percole et créée une nappe perchée s’il y a un horizon induré et/ou peu perméable à faible profondeur.

De même l’irrigation généralement pratiquée de façon gravitaire en milieu oasien était jusqu’à présent excédentaire (cette situation évolue avec le changement climatique). De ce fait les percolations profondes alimentent une nappe perchée qui peut être salée ou va le devenir avec le lessivage des sels  du sol par l’eau d’irrigation.

En raison de ces deux phénomènes (excès d’eau d’irrigation, rejets d’eaux usées non traitées), les palmiers dattiers de certaines oasis soufrent d’hydromorphie et la mauvaise qualité de l’eau de cette nappe affecte même la qualité des dattes.

On doit savoir que les racines du palmier peuvent atteindre -17m. Donc si l’on justifie l’irrigation déficitaire en surface par rapport à l’ETP calculée avec les formules de la FAO (Penman-Monteith), sans avoir pris connaissance de l’existence ou non d’une nappe dans laquelle le palmier dattier va puiser, le raisonnement est sans valeur. Si l’on rationne l’apport d’eau surface, le palmier va la chercher en profondeur, comme tout arbre.

Nous voyons donc au terme de cette première analyse que nous ne sommes pas dans un domaine de certitude concernant les volumes d’eau apportés aux palmiers dattiers. La deuxième question est de savoir si on lui apporte ce dont il a besoin.

Après avoir pris la précaution d’évaluation – même sommaire – de la pédologie et de l’hydrogéologie, la caractérisation de toute palmeraie à des fins productives obéit à quatre critères :

  • Le contexte climatique résumé par l’évaporation maximum (ETo) qui est un phénomène physique calculable avec des paramètres climatiques mesurables avec une station météorologique ;
  • La densité d’arbres de la palmeraie (nombre d’arbres par hectare) et s’il s’agit d’une palmeraie homogène ou d’une palmeraie avec végétation étagée. Les études qui indiquent un volume d’eau à l’hectare sans préciser le type de palmeraie, la densité d’arbres et le mode d’irrigation ne présentent qu’un intérêt relatif ;
  • Le volume annuel distribué (m3/arbre/an) ;
  • La valorisation de l’eau (Kg de matière sèche par mètre cube d’eau).

La première difficulté à laquelle l’ingénieur de développement se heurte est la disponibilité de données climatiques, alors que des stations automatisées à moindre coût fonctionnant à énergie solaire, existent sur le marché et qu’avec le développement de la téléphonie mobile on peut relier ces stations à un réseau national de collecte et d’analyse des données.

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Donc pourquoi n’existe-t-il pas une telle station par région oasienne ? Si la station existe, on trouve rarement un bac Colorado Classe A pour mesurer in situ l’évaporation réelle (ETo).

Station météorologique automatisée. Photo Diasporadz

Station météorologique automatisée

Le premier paramètre cité relatif à la climatologie (ETo), va donc permettre d’évaluer le besoin en eau décadaire ou mensuel du palmier selon le stade de végétation, lequel est caractérisé par le coefficient Kc dans la formule de Penman – Monteith.

ETC = Kc * ETo

Les coefficients Kc de Monteith peuvent être affinés pour tenir compte des variétés de datte et de la physiologie végétale des arbres notamment leur âge. En effet les coefficients culturaux changent d’une année à une autre lors de l’évolution d’une nouvelle plantation et cependant les 10 premières années, puis se stabilisent en plantation adulte.

On doit donc considérer deux choses : la consommation en eau et le dimensionnement du projet. L’ingénieur n’étudie pas un projet pour une année donnée mais se projette sur une trentaine d’années, qui est le temps d’amortissement du réseau généralement considéré dans les études agro-économiques.

Les palmiers auront donc largement le temps de devenir adultes ; aussi le dimensionnement de projet se basera sur le stade adulte des arbres, et la pratique de l’irrigation ajustera ensuite les doses d’irrigation selon l’âge, soit de façon théorique avec le bilan hydrique soit par un pilotage à l’aide de sondes tensiométriques soit par le retour d’expérience.

Concernant ce dernier point, en termes d’économie, d’efficience d’utilisation de l’eau et de durabilité, l’expérience a montré que le meilleur régime hydrique correspond à un apport de 60, 100 et 80 % de l’évapotranspiration maximale respectivement pour les périodes hivernales, printanières et estivales.

Les palmeraies à datte se trouvent généralement dans des pays au climat aride (moins de 100 mm de pluviométrie par an) et hyperaride (50 mm de pluviométrie par an) ayant un très fort déficit hydrique. La prise en compte de la pluviométrie dans le calcul des besoins en eau est généralement effectuée en éliminant les pluies inférieures à 5 mm où l’eau tombant sur un sol surchauffé se vaporise, et en retenant 80 % des autres pluies comme contribution au bilan hydrique.

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Le deuxième des quatre critères cités va permettre d’apporter un facteur correctif au calcul précédent, en tenant compte de la couverture du sol par les arbres ; une palmeraie plantée en 5 x 5 couvre entièrement le sol, alors qu’une palmeraie plantée en 10 x 10 laisse passer une part importante de lumière qui évapore l’eau du sol si l’irrigation se fait par inondation..

A cet effet, il convient de souligner que ce n’est pas « l’hectare qui évapore l’eau mais le végétal » à la fois par ses stomates et son bulbe racinaire. La pratique agronomique considère que le bulbe racinaire d’un arbre (zone explorée par ses racines) est égal à la surface foliaire projetée au sol multipliée par la profondeur moyenne des racines denses absorbantes.

Le palmier possède 4 types de racines et ces racines ont pour double fonction de fixer l’arbre mais aussi d’extraire du sol l’eau et les sels minéraux et le volume de sol exploré par les racines est important (on peut considérer en première approximation une profondeur explorée de deux mètres).

L’objectif de l’irrigation est de maintenir humidifié, le bulbe racinaire de l’arbre en apportant l’eau dans la zone occupée par ce bulbe ; l’apport d’eau en dehors de ce bulbe, s’il n’y a pas de cultures intercalaires, est une pure perte.

La Réserve d’eau Facilement Utilisable (RFU) dépend de la texture (généralement à dominante sableuse) et les besoins sont importants eu égard à l’évapotranspiration. De ce fait les palmiers sur des sols peu profonds peuvent se trouver soumis à des stress hydriques.

Le recouvrement au sol est fonction de l’âge du palmier et de la densité de plantation. Pour connaître le nombre d’arbres à l’hectare, on peut les compter notamment lorsqu’il s’agit d’une plantation non ordonnée ou bien diviser 10 000 m² par l’écartement, sachant que dans ce cas on commet une erreur par excès puisqu’on ne tient pas compte de l’effet de bordure.

Chacun sait qu’on ne plante pas un arbre sur la limite avec le voisin et les palmeraies ont généralement un espace technique non planté (bassin, parking, local du gardien…) ; en outre les parcelles ne sont pas toujours cadastrées, donc la superficie déclarée par le propriétaire peut être entachée d’erreur. Connaissant le nombre d’arbres et la surface moyenne du feuillage d’un arbre projetée au sol, il est possible de connaître le taux de couverture au sol par hectare planimétré ; c’est le coefficient Kr.

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Par exemple une palmeraie d’un hectare en densité 7 x 7 comprendra 14 rangées d’arbres donc 13 allées de 7m et deux bordures latérales de 4,5m [soit (13 x 7m) + (2x 4,5m) = 100m], soit 14×14 = 196 arbres alors que le calcul par l’écartement donnera 10 000 m²/ (7×7) = 204 arbres.

S’il s’agit d’arbres jeunes, le diamètre du feuillage projeté au sol sera d’environ deux mètres donc :

Kr= (3,1416×196)/10 000 = 0,06

S’il s’agit d’arbres adultes de diamètre du feuillage projeté au sol sera d’environ 7 mètres nous aurons :

Kr= (38,5×196)/10 000 = 0,75

On considère donc que l’évapotranspiration réelle (ETR) concerne le besoin physiologique l’arbre et l’évaporation au sol de l’eau apportée sur la partie superficielle du bulbe humide. En reprenant la formule précédente, si l’on veut connaître le besoin en eau des arbres par hectare nous avons :

ETR = Kr * ETc

Comme on peut le constater on peut aboutir à des volumes complètement différents à l’hectare en termes de consommation en eau, si l’on ignore la densité d’arbres et l’âge de la plantation.

On peut se demander à ce stade de l’analyse si l’on peut agir sur les deux paramètres précités : le fonctionnement physiologique de l’arbre par les stomates et l’évaporation au droit du bulbe racinaire.

Le constat que chacun peut faire est qu’un palmier isolé consomme plus d’eau qu’un palmier dans une palmeraie et qu’il y a une croissance différente des arbres en bordure. On définit ainsi un « effet oasien » lié à la biomasse qui réduit la température et augmente le taux d’humidité de l’air au sein de la palmeraie apportant ainsi un confort thermique (raison pour laquelle il y a de plus en plus d’habitations dans les palmeraies). Néanmoins cet effet oasien n’a pas été quantifié en termes de réduction des besoins.

La réduction de l’évaporation au sol nous amène à parler ici des bonnes pratiques agronomiques :

  • Pour réduire l’évaporation au sol sur la partie superficielle du bulbe racinaire et en particulier la technique de mulch en utilisant les sous-produits végétaux broyés de la palmeraie ;
  • Pour irriguer correctement : le système le plus efficace est celui qui permet de mouiller la surface du bulbe racinaire soit un cercle d’environ 7m de diamètre centré sur le tronc pour un palmier adulte; le nombre de goutteurs ou le choix des micro-asperseurs sera fait dans cet objectif, en tenant compte de la texture du sol (un sol sableux diffuse peu transversalement et va surtout  mouiller le sol à la verticale du goutteur) ;
  • L’introduction de matière organique augmente la réserve utilisable ; tous les apports de matière organique ou encore de fumier décomposé aura des effets très bénéfiques sur la rétention de l’eau en rappelant ici que la minéralisation dans cet horizon de surface est très rapide à cause des températures élevées qui favorisent l’activité microbienne ;
  • La réalisation de brise-vents en périphérie de palmeraie pour limiter l’effet négatif de bordure et améliorer le confinement.

A l’inverse, il faut signaler les mauvaises pratiques d’irrigation qui gaspillent de l’eau sans apporter l’efficience requise comme l’irrigation à la raie le long du rang de palmier ou la réalisation de petits bassins de 2m de diamètre confectionné autour du tronc ; ces pratiques limitent l’absorption de l’eau dans le volume racinaire.

Irrigation à la raie sur la ligne. Photo Diasporadz

Irrigation à la raie sur la ligne

Ceci nous amène à considérer le mode d’irrigation et son efficience, afin de pouvoir quantifier l’apport d’eau en tête de parcelle.

Un consensus se dégage sur l’efficience des divers modes d’irrigation : gravitaire (entre 40 et 50% d’efficience), aspersion (70%), micro-aspersion (85%), goutte à goutte (90%). Le volume précédemment calculé pour répondre aux besoins en eau de la plante doit être divisé par le chiffre ci-dessus selon le mode d’irrigation adopté, afin de quantifier l’apport en tête de réseau.

En conclusion, au vu de ce qui a été exposé précédemment, il est facile de comprendre que toute publication qui fait état d’un volume d’eau à l’hectare sans préciser dans quelles conditions il a été acquis, ne peut servir de référence.

On préfèrera donc utiliser pour le calcul de projet, le troisième critère qui est le volume d’eau apporté annuellement par arbre en précisant le mode d’irrigation adopté, toutes choses égales par ailleurs (âge de la plantation, type de sol…), afin que les résultats soient comparables entre régions oasiennes.

Le dernier critère à aborder concerne la valorisation de l’eau. Dans une situation de limitation de la ressource ou de pénurie d’eau, il importe d’utiliser au mieux cette ressource dans une perspective de valorisation du mètre cube d’eau et de sécurité alimentaire, sachant que les deux ne vont pas toujours ensemble (les cultures exportables à forte valorisation ne contribuent pas forcément à nourrir les populations).

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La valorisation économique du mètre cube d’eau en système oasien n’est pas comparable d’une oasis à l’autre car elle fait intervenir des systèmes de production diversifiés et des variétés de dattes rémunérées différemment. On s’en tiendra donc à la valorisation productive de datte.

D’un point de vue scientifique, il est intéressant de considérer l’efficience de l’eau transpirée (soit le coefficient transpiratoire dû à la régulation biologique des stomates), c’est-à-dire le rapport de la production de matière sèche totale (MST) à l’eau transpirée par la plante. Dans une optique de comparaison de performance entre palmeraies, on sélectionnera comme indicateur, la production de datte en kilo de matière sèche commercialisée par mètre cube d’eau apporté. La datte a un taux d’humidité voisin de 20% mais il peut varier selon les variétés. Il est donc préférable de rapporter le poids à la matière sèche.

La production de datte commercialisée est connue puisqu’elle est pesée et détermine le revenu de l’agriculteur. La production non commercialisée (déchets issus du tri) est moins connue mais peut être importante.

Dans les palmeraies, toutes les dattes ne sont pas forcément collectées soit pour des raisons économiques (l’exploitation de la palmeraie coûte trop cher notamment quand les arbres sont âgés) soit pour des raisons sociales (manque de main d’œuvre qualifiée pour la pollinisation ou la récolte et/ou coût trop élevé de la main d’œuvre eu égard à la valorisation de la variété de datte de la plantation) soit par insuffisance d’eau ; la palmeraie est alors conservée comme lieu de résidence ou pour raison  touristique ou comme jardin familial avec cultures étagées. Dans ce cas, l’irrigation déficitaire devient une pratique courante car il s’agit avant tout de maintenir les arbres en vie à moindre coût.

Dans toute étude de palmeraie, il faut donc préciser dans quel contexte on se situe. Lorsque la recherche de la productivité et du profit est le motif principal, les critères de performance de l’irrigation pour économiser de l’eau, de quantité et de qualité de la production (les dattes sont classées par catégorie et payées en conséquence) sont primordiaux.

Les charges d’exploitation d’une palmeraie sont liées aux coûts des intrants, de la main d’œuvre et de l’énergie. Les deux premiers postes dépendent de facteurs sur lesquels il est difficile d’agir. Il reste donc le poste énergétique, charge variable corrélée à consommation en eau et aussi au besoin de l’économiser.

On est étonné de constater que l’énergie photovoltaïque soit peu utilisée pour irriguer les palmeraies alors qu’elles se situent dans des pays possédant un fort rayonnement solaire. S’il s’agit de faire baisser les charges énergétiques outre la réduction des volumes, on pourrait rechercher une énergie moins chère.

Concernant l’économie d’eau, la première démarche consiste à mesurer l’eau apportée, à vérifier si elle correspond aux besoins en eau des palmiers et ensuite à améliorer la distribution au niveau du bulbe racinaire.

S’engager sur une irrigation dite déficitaire quand ne connait pas ces paramètres, ne veut pas dire grand-chose car il peut s’agir simplement d’apporter la bonne dose au bon moment (ce qui n’avait peut-être pas été effectué auparavant). L’automatisation et la programmation de l‘irrigation, permettent aujourd’hui d’atteindre cet objectif en pilotant correctement l’irrigation avec la méthode du bilan hydrique et des sondes tensiométriques.

On peut ensuite envisager une irrigation déficitaire par rapport aux besoins réels issus du calcul précédent, en connaissance de cause, et envisager une expérimentation sur plusieurs années avec la mesure et le suivi des indicateurs précités dans le temps,toutes choses égales par ailleurs.

Si certains paramètres sont modifiés durant l’expérimentation comme par exemple le changement de système d’irrigation ou l’introduction de nouveaux amendements organiques (cas du Biochar qui améliore la rétention d’eau dans le sol), les résultats obtenus sont faussés.

Amendement organique du sol (Biochar). Photo Diasporadz

Amendement organique du sol (Biochar)

En conclusion, nous voyons que les quatre critères cités dans cette analyse, nous permettent de connaître une palmeraie dattière quelle que soit sa position GPS, de s’y référer dans des publications et de les utiliser dans des études de projet, dans la mesure où ces paramètres ont été quantifiés.

Avec ces critères on définit le contexte climatique général de la palmeraie, les besoins en eau des palmiers, la quantité d’eau apportée par arbre en tête du réseau d’irrigation et la production à l’hectare. Les données de contexte associées permettent de comprendre comment fonctionne le système d’irrigation. On peut ainsi comparer divers sites de production dans la mesure où l’on sait de quoi on parle.

Nous pouvons donner deux exemples, l’un sur une oasis saharienne dans le Gourara (Algérie) et l’autre dans la région de Médina – Al Ula (Arabie saoudite).

R. Jourdan et M. Bouchentouf

(*) Régis Jourdan est Consultant Génie Rural – Aménagement du territoire). Le docteur Mohamed Bouchentouf est ancien cadre au Ministère de l’Agriculture, Spécialiste de l’Agroécologie des Régions Arides et Semi-arides, Directeur de la Micro-Ferme Ecologique et Innovante « la Clé des Oasis » Timimoun Algérie

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