lundi, 20 mai 2024
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« Le fils du pauvre » de Mouloud Feraoun, une œuvre majeure

Mouloud Feraoun est un grand écrivain en langue française. « Le fils du pauvre » fait partie de ses œuvres majeures et est devenue un classique de la littérature.

Dans ce livre, Mouloud Feraoun décrit la vie dans un village kabyle dans les années 1920 – 30, pendant la période de la colonisation française. En racontant la vie du jeune Menrad, il raconte la sienne. Le narrateur et l’auteur sont tout au long du récit confondus.

La vie des villageois est rude, il n’y a pas de luxe, pas de superflu. Ils vivent dans une habitation sommaire. La principale préoccupation est de se nourrir, de manger à sa faim, ce qui souvent n’est pas le cas. Les gens souffrent, les femmes meurent en accouchant, la mortalité des enfants est importante.

L’organisation sociale est telle que les différences entre les uns et les autres n’apparaissent pas dans la façon de vivre : « Nous sommes tous de la même condition parce que tous les kabyles de la montagne vivent uniformément de la même manière. Il n’y a ni pauvres ni riches ».

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On se rend compte que les bienfaits supposés de la colonisation ne sont pas arrivés jusqu’ici. L’avenir s’annonce sans espoir de progrès social, les jeunes seront bergers ou paysans. Partir travailler en France était pour certains une nécessité pour pouvoir envoyer de l’argent et permettre à la famille de subsister. Et cela était un déchirement pour tous : « Le lendemain matin se levant le dernier, comme d’habitude, il trouva sa mère et ses sœurs tout en pleurs. Le père était parti à l’aube, et, pour ne pas accroitre son chagrin, il avait préféré partir à l’insu de tous, sans embrasser personne ».

Seul aspect positif, la possibilité pour certains enfants, peu nombreux, de faire des études. Mais il leur fallait une volonté farouche et accepter beaucoup de sacrifices. Cela dépendait aussi de l’aide de missions qui fournissaient un logement et la nourriture aux plus méritants car les parents étaient trop pauvres pour payer les frais de l’internat.

Cela dépendait aussi de leur accord pour se priver du travail dans les champs de leur jeune garçon. Pour des raisons que l’on peut comprendre, envoyer les enfants à l’école n’était pas la priorité des parents : « Les pères de famille qui passent leur temps à essayer de satisfaire les petits ventres peuvent-ils s’occuper également des petites cervelles ? »

Dans ces circonstances, échapper à sa condition grâce à un cursus scolaire, ne pouvait qu’être exceptionnel. C’est pourtant ce qui arriva à Fouroulou Menrad (Mouloud Feraoun), qui réussira à intégrer le collège puis à entrer à l’école normale.

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Mouloud Feraoun aborde des thèmes de la pauvreté, de l’éducation, de l’identité, du mode de vie. Il décrit la société algérienne campagnarde de l’époque, qui pratiquait des valeurs de solidarité, d’entraide, mais qui était aussi la proie de luttes intrafamiliales, de divisions, de mesquineries. 

« Helima volait la communauté. C’était admis. Elle se mit à voler son mari. Elle prélevait régulièrement une partie de tout ce qui rentrait – céréales, huile, figues, laine – et la vendait à bas prix ». 

Dans cette société colonisée, il montre la violence, physique, psychologique et sociale qui faisait peser un carcan sur les gens. Et il fallait être fataliste pour surmonter les coups durs de la vie : « la mort fauche couramment des gens dans la fleur de l’âge. On pleure, on se lamente à s’enrouer la voix pour une semaine, puis on se tâte pour se dire que l’on reste après le disparu et que, malgré tout le mal est sans remède puisque rien n’influe sur l’inexorable horloge du destin ».

L’auteur évoque aussi les sentiments d’amour qui existent dans la famille, même si une énorme pudeur les empêche souvent d’être exprimés ouvertement.

Dans un style épuré, réaliste et avec une grande sensibilité il décrit les lieux et les personnes.

Mouloud Feraoun, par les thèmes qu’il aborde, touche à l’universel. « Le fils du pauvre » est devenu un classique de la littérature algérienne, un grand livre de la littérature.

Robert Mazziotta

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