Nous reproduisons ci-dessous une contribution de Mohand Arezki Aït Ouazou, un des chefs de zones de la Fédération de France du FLN, qui revient, par devoir de mémoire et de vérité, sur la répression de la manifestation des Algériens le 17 octobre 1961 à Paris. Contribution
Il y a 64 ans, le 17 octobre 1961, les Algériens résidant à Paris et dans sa banlieue manifestent pacifiquement contre le couvre-feu injuste et raciste instauré par la préfecture de police interdisant aux seuls Algériens de circuler entre 20h30 et 5h30 du matin, à compter du 6 octobre 1961.
Face aux mesures arbitraires et discriminatoires prises par le préfet de police Maurice Papon, couvert par sa hiérarchie, la fédération de France du FLN, organisation de la communauté algérienne émigrée, appelle les Algériens à manifester pacifiquement contre l’arbitraire et exiger des négociations pour mettre fin à la guerre coloniale contre le peuple algérien qui lutte pour son droit inaliénable à l’autodétermination et à l’indépendance.
Le 17 octobre 1961, les Algériens se rendent par dizaines de milliers aux lieux de départ des cortèges, dans les quartiers de l’Opéra, les Grands Boulevards, le carrefour Richelieu Drouot et le long du boulevard Haussmann. Ils manifestaient pacifiquement pour dénoncer ce couvre-feu discriminatoire et revendiquer l’indépendance de l’Algérie.
La manifestation est réprimée sauvagement sous les yeux médusés de la population parisienne inerte : les forces de police ouvrent le feu à l’arme automatique sur les manifestants. Les premières victimes tombent à hauteur du cinéma Le Grand Rex, sur le boulevard de Bonne-Nouvelle. Un autocar de police n’hésite pas à foncer sur les manifestants. Cette répression sanglante a fait des centaines de victimes parmi les manifestants algériens : certains périssent jetés dans la Seine et noyés, d’autres sont blessés et plus de 11 500 manifestants sont arrêtés et conduits dans les centres d’internement à Vincennes et à la Porte de Versailles.
Les 18, 19 et 20 octobre, les femmes algériennes émigrées se sont rassemblées devant les lieux de détention des manifestants algériens pour clamer leur solidarité avec leurs frères et sœurs détenus qui ont entamé une grève de la faim illimitée. Bousculées, battues, insultées et menacées, elles tiennent tête aux policiers. Elles réaffirment leur volonté de poursuivre la lutte illustrant ainsi la participation des femmes algériennes émigrées au combat libérateur.
Enfin, la manifestation du 17 octobre 1961, en dépit de cette répression d’une sauvagerie inouïe qui a fait des centaines de morts et de blessés, est considérée par l’opinion internationale comme une victoire du FLN dans son combat pour le recouvrement de l’indépendance de l’Algérie.
Plus de soixante ans après les massacres du 17 octobre 1961, les plus hautes autorités de la République française, en dehors de quelques gestes symboliques, ne reconnaissent toujours pas le crime d’Etat commis à Paris, par les forces de police sous les ordres du préfet Maurice Papon, couvert par ses supérieurs, le ministre de l’Intérieur, Roger Fray, et le Premier ministre, Michel Debré, partisan de l’Algérie française, hostile aux négociations entre le Gouvernement français et le GPRA.
Chaque année, par devoir de mémoire et de vérité, des dizaines d’associations et de personnalités françaises commémorent, aux côtés des Algériens, les massacres du 17 octobre 1961. Plus de soixante ans après ces massacres, elles renouvellent leurs exigences des plus hautes autorités de la République « la reconnaissance de ce crime d’Etat, l’ouverture de toutes les archives et la mise en place d’un véritable lieu de mémoire ». Aujourd’hui, les jeunes générations poursuivent le travail de mémoire n’en déplaise aux nostalgiques de l’Algérie française et aux tenants du discours de haine anti-Algérie.
La communauté algérienne commémore chaque année les événements tragiques du 17 octobre 1961. Elle rend un vibrant hommage aux patriotes algériens tombés en martyrs pour la liberté et l’indépendance de l’Algérie. Parmi ces valeureux patriotes, citons le Moudjahed Maamar Kaci (dit Belkacem moustache) qui était chef de la Wilaya de Paris. A ce titre, il a été le principal organisateur de la manifestation qu’il dirigeât sur le terrain avec courage et esprit de sacrifice. Il a échappé miraculeusement à l’arrestation et à une mort certaine. C’est pour nous un devoir de rendre hommage à ce vaillant militant de terrain qui a accompli son devoir dans l’anonymat le plus total, avec courage et abnégation. Maamar Kaci nous a quitté en 1994. Repose en paix Si Belkacem.
Gloire à nos valeureux chouhadas
Paris, le 17 octobre 2025.
Mohand Arezki Aït Ouazzou
Moujahid de la Fédération de France du FLN, Wilaya VII