Il fallait y être. Le Dôme de Paris a vibré ce samedi soir, 7 juin, aux couleurs et aux sons de la Kabylie, portés par la voix profonde et intemporelle d’Amour Abdenour.
Devant une salle comble, l’icône de la chanson kabyle Amour Abdenour a offert à Paris un concert d’une rare intensité, mêlant émotion, maîtrise scénique et chaleur humaine. Une réussite totale, saluée par un public venu en nombre, de tous âges et de toutes générations.
Dès les premières notes, le ton était donné : celui d’une soirée pas comme les autres. L’enfant de Leflaye, fidèle à une trajectoire artistique empreinte de sincérité et de rigueur, a enchaîné les titres cultes, déclenchant ovation sur ovation dans un Dôme de Paris transformé en scène populaire aux accents kabyles, en plein cœur de la capitale.
Accueilli par un tonnerre d’applaudissements dès son entrée sur scène, Amour Abdenour a chaleureusement salué les nombreux présents, exprimant son amour et sa gratitude envers son public, avant de leur adresser un « Saha Aïdkoum » empreint de ferveur en ce jour de l’Aïd. Il a ensuite saisi son fidèle mandole pour entraîner l’assistance dès les premières gammes, en ouvrant le bal avec la chanson « Azul Fellawen », une salutation amazighe symbolique. Il était entouré d’un orchestre symphonique professionnel, composé de 16 musiciens et musiciennes talentueux — parmi lesquels Mouloud Aït Ali, Rafik Korteby et Amar Chaoui — ainsi que d’un trio féminin aux voix douces et harmonieuses, en l’occurrence Sandra Hamidi, Lisa Hamitoche et Massila Barbar. L’ensemble était dirigé avec maestria par Mokrane Adlani, virtuose de l’oud et du violon.
Ce fut un moment de communion intense, partagé entre générations : ceux qui le suivent depuis ses débuts et les plus jeunes, conquis par son style et son timbre vocal inimitable.
Au fil des prestations, Amour Abdenour a revisité les grandes étapes de sa carrière, remontant jusqu’à ses 17 ans avec la chanson «Inas I Yemma« , dédiée à son ami récemment disparu, Mouloud Mohia, frère du regretté Mohya, dramaturge et poète algérien. Il a également interprété des titres emblématiques tels que « Tefragh Lvez», «Snat Ay S3igh »,« Inas iw-maghvun » ou encore « A3yigh », dans une parfaite alchimie entre intensité musicale et émotion collective.
Parmi les présents, nous avons eu l’honneur de croiser Nna Adouda, une dame de 84 ans, venue accompagnée de son petit-fils. Rayonnante de joie, elle nous a confié, au micro du journal en ligne DiasporaDZ : « J’ai tenu à être présente à cette fête pour écouter Amour Abdenour. C’est un chanteur dont les paroles nous interpellent, qui nous parle avec beaucoup d’élégance et une musicalité qui nous berce, malgré le poids de l’âge. Je suis très heureuse, je remercie Dieu de m’avoir offert ce privilège avant de quitter ce monde. » Un témoignage bouleversant, symbole vivant du lien transgénérationnel qu’incarne Amour Abdenour. La salle était comble, l’ambiance électrique, la scène vibrante.
Une organisation réussie et une animation remarquable
Au-delà de la performance magistrale de l’artiste, le concert a aussi été salué pour la qualité de son organisation. Piloté par Future Yal Production, l’événement s’est déroulé sans accroc, bénéficiant d’une coordination rigoureuse, sous la direction efficace du duo mouloud dit Mick et Hanafi Moualfi — ce dernier, fidèle à son image, alliant élégance naturelle et maîtrise organisationnelle.
Par sa présence mesurée et son ton juste, l’animation a agréablement ponctué la soirée. Le trio de maîtres de cérémonie a su créer une atmosphère conviviale et dynamique, captant l’attention du public dès les premiers instants. La célèbre présentatrice de l’émission Tirga Ufenane, Souhila Mohandi, le poète et animateur Hamid Aït Saïd, ainsi que Hanafi Moualfi lui-même, ont assuré la transition entre les moments musicaux avec justesse et complicité. Leur présence chaleureuse et leur sens du rythme ont mis « l’eau à la bouche » du public, annonçant avec ferveur chaque étape de cette soirée exceptionnelle.
Des invités de prestige pour un final en apothéose
Dans le public, un parterre d’invités d’exception témoignait de la portée symbolique de l’événement. N’en citer que quelques-uns : Le doyen de la chanson algérienne, Kamel Hamadi, le chanteur Ali Amran, la diva Malika Domrane, le sympathique Youcef Boutaleb, l’écrivain Youcef Zirem, le poète Brahim Saci, le regard affûté du photographe et cameraman Arezki Aït Rabah, ou encore le journaliste emblématique Rachid Arhab… Tous avaient fait le déplacement pour saluer, par leur présence, la trajectoire d’un artiste qui, depuis plus d’un demi-siècle, incarne l’âme musicale de la chanson Kabyle. Une mosaïque d’intelligences et de talents réunie dans l’écrin du Dôme, en hommage à une légende vivante.
La soirée s’est poursuivie jusqu’à tard dans la nuit, dans une ambiance de fête et de ferveur. En guise de clap de fin, le journaliste sportif Lounis Temzi et l’ancien attaquant de la JS Kabylie, Belkacem Makri — buteur victorieux de la première Coupe d’Algérie en 1977 — ont remis à Amour Abdenour un maillot du club floqué du numéro 50, en hommage à son demi-siècle de carrière. Un geste hautement symbolique, clin d’œil appuyé à sa célèbre chanson« Iwraghen, Iwraghen », véritable hymne dédié à ce monument du football algérien.
Sous un tonnerre de youyous et les chants« Imazighen »,« Assa Azeka JSK Tella, Tella », l’émotion était palpable, comme un signe du destin célébrant le retour de ce club emblématique sur la scène africaine.
Ce 7 juin 2025, la chanson Kabyle a brillé au cœur de Paris. Une fièvre du samedi soir pas comme les autres, portée par la voix d’un artiste iconique, gravée à jamais dans la mémoire collective.
Hamid Banoune