Artiste peintre algérienne originaire de Béjaïa, Bgayet, en Kabylie, Myriam Mohli conjugue avec intensité un héritage familial riche en traditions artistiques et culturelles, et une passion profonde pour la création.
À travers ses œuvres abstraites et colorées, l’artiste peintre Myriam Mohli explore la matière, les émotions et la mémoire, offrant un regard singulier et vibrant sur son univers intime et universel. Son parcours, marqué par de nombreuses expositions en Algérie et à l’international, témoigne d’une quête incessante de liberté et de partage.
Myriam Mohli, aussi appelée Myriam Mohli Aoues, a commencé à apprendre la peinture très tôt, dès l’âge de cinq ou six ans, grâce à sa mère Taous Hammouche, artiste peintre reconnue. Cette transmission précoce l’a profondément marquée. À quinze ans, elle réalise sa première exposition à la mairie de Saint-Étienne aux côtés de sa mère. Ce moment fut particulièrement marquant, une expérience qui confirma son désir de persévérer dans la voie artistique.
Leurs collaborations artistiques ont continué au fil des années, notamment lors de l’exposition « Immersion » à l’hôtel Holiday Inn de Chéraga, où elles ont présenté ensemble une soixantaine d’œuvres figuratives et abstraites. Cette exposition a permis au public de découvrir l’harmonie créative entre les deux artistes, chacune apportant sa propre vision et sensibilité à l’art. Ainsi, Taous Hammouche n’est pas seulement la mère de Myriam Mohli Aoues, mais aussi une figure influente dans son parcours artistique, ayant partagé avec elle une passion commune pour la peinture et contribué à son développement en tant qu’artiste.
Tout en menant une carrière exigeante d’infirmière diplômée, Myriam Mohli a toujours gardé un espace personnel réservé à la création. Artiste peintre autodidacte, Myriam Mohli a toutefois complété son parcours par une formation artistique à Alger, où elle a pu enrichir ses pratiques et découvrir d’autres cultures plastiques. Elle aime à souligner l’importance des échanges qu’elle a vécus dans ces ateliers, notamment avec des artistes venus d’Égypte, du Maroc ou de la France, qui ont nourri sa réflexion et contribué à faire évoluer son style sans pour autant altérer sa signature esthétique.
Parmi les artistes qu’elle admire et qui l’influencent, on compte Claude Monet, Vincent van Gogh, la peintre algérienne Baya, ainsi que Mohamed Issiakhem. Son travail s’inscrit majoritairement dans l’art abstrait contemporain, souvent exécuté à l’huile ou à l’acrylique, avec une prédilection pour le couteau, instrument qui lui permet d’explorer la matière et d’insuffler un mouvement et une intensité vibratoire à ses œuvres. Elle pratique également le figuratif, offrant ainsi une palette expressive large et nuancée.
Un feu d’artifice chromatique
L’art de Myriam Mohli Aoues est une plongée intense et viscérale dans l’abstraction texturée, où la matière de la peinture devient presque sculpturale. Grâce à l’usage prédominant du couteau à palette, elle dépose la peinture en épaisseurs généreuses et en gestes spontanés, créant ainsi des surfaces riches de reliefs profonds et variés. Ces empâtements captent la lumière avec une intensité particulière, donnant à ses toiles une dimension presque tridimensionnelle qui invite le regard à se perdre dans les creux et les volumes. Cette technique, loin d’être simplement décorative, insuffle à ses compositions une énergie brute, un dynamisme puissant, souvent perçus comme l’expression vibrante de forces naturelles en mouvement ou d’états émotionnels exacerbés.
La palette de l’artiste peintre Myriam Mohli est un véritable feu d’artifice chromatique : des bleus électriques, des violets profonds, des touches délicates de rose ou d’or métallique se confrontent et se mêlent sur la toile, amplifiant l’impact visuel et intensifiant la charge émotionnelle de l’œuvre. Chaque couleur est travaillée avec un soin quasi alchimique, un mélange subtil qui donne à ses bleus cette profondeur mouvante et mystérieuse, évoquant à la fois la mer, les cieux et les profondeurs de l’âme.
Si son art reste principalement ancré dans l’abstraction lyrique, Myriam Mohli n’hésite pas à y intégrer des silhouettes humaines allongées, stylisées, presque uniformes. Ces figures, posées sur le tumulte chromatique en arrière-plan, apportent un contrepoint narratif et une réflexion sur la place de l’individu — isolé ou en groupe — face à l’immensité du monde, à son chaos et à ses turbulences. Ces formes humaines, à la fois simples et énigmatiques, instaurent un dialogue entre le personnel et l’universel, entre l’intime et le cosmos.
L’inspiration de Myriam Mohli s’enracine souvent dans la contemplation des éléments naturels, et particulièrement de la mer qu’elle fréquente au quotidien. Elle capte dans ses toiles la puissance, la fluidité et la fugacité des vagues, traduisant en gestes et couleurs ce mouvement incessant de la nature, cette force à la fois apaisante et déchaînée.
La peinture de Myriam Mohli est une expérience sensorielle puissante où la matière, le geste et la couleur fusionnent pour créer une expression contemporaine vibrante et passionnée. Elle fait du médium lui-même le sujet principal, offrant au spectateur un voyage visuel et émotionnel au cœur d’une abstraction sensible et énergique, capable de toucher autant qu’elle interroge.
Sa carrière artistique est jalonnée de nombreuses expositions, aussi bien en Algérie qu’à l’international. Parmi les lieux où elle a présenté son travail figurent la Galerie Bab Ezzouar, l’Opéra d’Alger, l’Institut français d’Alger, mais aussi des espaces prestigieux à Paris tels que le Business Affaire espace Nesle dans le quartier de Saint-Germain-des-Prés, ou encore l’International Art Gallery au village Suisse.
L’artiste peintre Myriam Mohli adopte un regard clairvoyant et sans concession sur la scène artistique algérienne, conscient des défis structurels et culturels qui freinent le développement et la reconnaissance des créateurs locaux. Elle souligne avec regret le déficit notable de visibilité pour les artistes algériens, qui peinent souvent à trouver des espaces d’exposition dignes de leur talent, tant en Algérie qu’à l’international. Ce manque de visibilité est en partie lié à une insuffisance de soutien institutionnel et à un marché de l’art encore embryonnaire, où prédominent fréquemment des œuvres produites en série, des reproductions ou des créations à vocation purement décorative, au détriment des pièces originales et uniques qui portent véritablement la voix et l’âme des artistes. Cette situation reflète un problème plus large, celui d’une éducation artistique encore trop limitée, qui ne permet pas toujours au public d’appréhender la richesse et la profondeur des expressions plastiques contemporaines. La culture artistique demeure souvent reléguée au second plan dans les priorités sociales et économiques, privant ainsi la société d’une dimension essentielle à son épanouissement et à sa diversité culturelle.
Face à ce constat, Myriam Mohli nourrit l’espoir d’un avenir plus favorable, où la culture artistique occuperait une place centrale, valorisée et encouragée. Elle rêve de voir se multiplier les galeries, les centres d’art et les espaces de diffusion qui offriraient aux artistes locaux des plateformes pour exposer, dialoguer et confronter leurs œuvres à un public élargi et curieux. Une telle dynamique contribuerait non seulement à enrichir le paysage culturel national, mais aussi à renforcer la reconnaissance des créateurs algériens sur la scène mondiale, en leur offrant la légitimité et la visibilité qu’ils méritent.
Sur un plan plus personnel, Myriam Mohli aspire à poursuivre son parcours artistique à travers des résidences à l’étranger, notamment en Tunisie ou au Maroc, pays voisins avec lesquels elle partage une histoire, une culture et des échanges artistiques riches. Ces expériences lui permettraient d’élargir ses horizons, d’enrichir son langage pictural par le biais de rencontres et de collaborations, tout en s’inscrivant dans une dynamique d’échange interculturel précieuse pour la vitalité de sa création. Ces résidences représentent pour elle des espaces d’émulation et de renouvellement, où la confrontation avec d’autres artistes et d’autres pratiques nourrit la créativité et ouvre de nouvelles perspectives.
Ainsi, au-delà de sa pratique artistique, Myriam Mohli se positionne aussi comme une artiste engagée, consciente des enjeux de son époque et désireuse de contribuer à faire évoluer positivement le paysage artistique algérien, en y insufflant plus de visibilité, de soutien et de dialogue culturel.
Au-delà de sa maîtrise technique et de la richesse chromatique qui caractérisent ses œuvres, l’apport de Myriam Mohli se manifeste avant tout par la sincérité et la profondeur de sa voix artistique, unique et authentique. Cette voix s’inscrit dans une dynamique singulière où se conjuguent harmonieusement plusieurs héritages : celui d’une tradition familiale profondément ancrée dans l’art, avec une mère qui fut son premier guide et modèle, celui d’une rigueur professionnelle forgée par sa carrière d’infirmière, discipline exigeante tant sur le plan intellectuel qu’humain, et celui enfin d’une liberté créatrice, sans cesse renouvelée, qui lui permet de dépasser les frontières conventionnelles et d’explorer de nouveaux territoires plastiques.
Son art ne se limite pas à la simple production de formes et de couleurs ; il se présente comme une véritable invitation à l’émotion, un espace où le spectateur est convié à un dialogue intime et sensible. Chaque toile devient ainsi un pont fragile mais puissant, reliant le vécu personnel, les souvenirs et les sentiments profonds de l’artiste à des questionnements universels sur la condition humaine, l’identité, la mémoire et la place de l’individu dans un monde en perpétuel mouvement. C’est cet équilibre subtil entre l’intime et l’universel qui confère à ses œuvres leur force et leur résonance.
Profondément enracinée dans sa terre kabyle
Femme profondément enracinée dans sa terre kabyle, région riche en traditions culturelles et artistiques, Myriam Mohli porte en elle cette mémoire collective tout en affirmant son regard singulier. Son engagement d’infirmière, métier dévoué à l’accompagnement et au soin de l’autre, ajoute une dimension supplémentaire à son parcours, celle d’une empathie authentique, d’une attention portée à la fragilité humaine qui nourrit également son travail artistique. Elle est ainsi à la fois une passeuse de mémoire et une exploratrice des émotions, mêlant avec justesse le sentiment et la réflexion.
L’artiste se révèle également être une femme passionnée, animée par une énergie créatrice inépuisable. Cette passion l’entraîne à constamment réinventer son langage pictural, à expérimenter de nouvelles techniques et à repousser les limites de la matière, tout en restant fidèle à son essence. C’est cette capacité à allier rigueur et inventivité, discipline et liberté, qui fait de son œuvre une source d’inspiration et de renouveau.
L’avenir de Myriam Mohli s’annonce prometteur, porté par ce feu intérieur et cette curiosité sans cesse renouvelée. Elle continue à explorer les infinies possibilités offertes par la peinture, consciente que cet art est un champ d’expression sans limites où se jouent en permanence la mémoire, la sensibilité et la quête d’un langage universel. Par son parcours et son œuvre, elle incarne ainsi une figure emblématique de la création contemporaine algérienne, dont la voix unique résonne bien au-delà des frontières.
Myriam Mohli Aoues incarne avec force et authenticité cette alchimie rare entre héritage, engagement et création. Son œuvre, profondément enracinée dans ses racines kabyles, enrichie par une carrière dévouée au soin des autres, et animée par une passion artistique sans cesse renouvelée, témoigne d’une vitalité qui dépasse les frontières culturelles et disciplinaires. Par la puissance expressive de ses toiles, où la matière, la couleur et l’émotion fusionnent, elle invite chacun à un voyage sensible, ouvrant un dialogue intime entre le vécu personnel et l’universel.
Femme d’engagement autant que d’invention, Myriam Mohli poursuit avec passion son exploration des infinies possibilités picturales, convaincue que l’art demeure un langage universel, porteur de mémoire, d’espoir et de transformation. Son parcours exemplaire et sa voix singulière font d’elle une figure incontournable de la scène artistique algérienne contemporaine, promettant encore de nombreuses découvertes et contributions majeures à venir.
Brahim Saci