Mohand Ouramdane Larab, mémoire vive de la poésie amazighe, écrivain et chercheur, s’impose aujourd’hui comme l’une des figures majeures de la préservation du patrimoine oral amazigh.
Né dans la capitale algérienne, l’écrivain et chercheur Mohand Ouramdane Larab s’est formé dans des domaines aussi variés que la finance, la gestion et le commerce international, avant de se tourner vers la culture et l’histoire, où il déploiera une passion rigoureuse pour l’oralité kabyle et l’héritage littéraire des montagnes de Kabylie. Ce parcours atypique, à la croisée de l’économie et des humanités, donne à son œuvre une profondeur rare.
À travers une pléthore d’ouvrages, l’écrivain et chercheur Mohand Ouramdane Larab s’est attelé à une mission que peu ont osé entreprendre avec autant d’ardeur : documenter, traduire et faire revivre les poètes oubliés de la Kabylie, notamment ceux issus de la tradition populaire. Parmi ses travaux les plus remarquables figurent les recueils consacrés à Si Mohand Ou Mhand, figure mythique du verbe rebelle kabyle, mais aussi à des poètes moins connus tels qu’Ahmed Lemseyyeh ou Si Youcef Oulefki. Dans chacun de ces ouvrages, l’auteur déploie un travail minutieux de collecte, de traduction et de contextualisation, tout en conservant la musicalité et la profondeur spirituelle de l’original.
Son engagement ne se limite pas à la littérature. Il a également mené une carrière dans le sport en tant qu’arbitre de football pendant une vingtaine d’années. À la fin de sa carrière sportive, il est devenu formateur d’arbitres, contribuant à former une nouvelle génération d’arbitres internationaux algériens. Ce parcours singulier est documenté dans son Dictionnaire des arbitres algériens de football, publié en 2018, un ouvrage pionnier dans le domaine.
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En 2022, il publie un essai biographique sur Lounès Matoub, qu’il décrit comme un « symbole des Berbères », analysant non seulement son œuvre poétique et musicale, mais aussi son rôle politique dans la résistance culturelle. Il poursuit avec un autre ouvrage s’intéressant aux figures historiques algériennes oubliées ou marginalisées après l’indépendance, contribuant ainsi à une entreprise de réhabilitation collective.
Mohand Ouramdane Larab n’est pas simplement un écrivain et chercheur, c’est aussi un passeur. Producteur de deux émissions culturelles à la radio Chaîne II entre 1998 et 2002, il a su faire entendre des voix anciennes au cœur du paysage médiatique contemporain. Ses contributions à la préservation du patrimoine amazigh lui ont valu plusieurs distinctions, parmi lesquelles trois Prix Mouloud Mammeri (1992, 1993, 1995) et le Prix Cavalier Numide en 2010.
Une œuvre riche et diversifiée
En matière de publications, son œuvre est aussi riche que diversifiée. Dès 1996, il publie à Rabat trois ouvrages majeurs : Recueil de poésie de Si Mohand Ou Mhend, Recueil de poésie de Cheikh Mohand Oul Hocine et Histoire de Cheikh Mohand Oul Hocine. Il conçoit également deux lexiques multilingues, l’un à usage scolaire, l’autre à visée économique (tamazight, arabe, français, anglais), et réédite une version bilingue des poèmes de Si Mohand. Son travail de mémoire inclut aussi des recueils de Lhadj Arezki Haouch, d’El Hocine Adeni et de Cheikh Mohand Oul Hocine. En 2006, une édition algérienne vient renforcer la diffusion de ses travaux, suivie d’une troisième édition augmentée des Isefra n’ Si Mohand Ou Mhend en 2021, préfacée par Idir Ait Amrane.
En 2018, il publie son Dictionnaire des arbitres algériens de football. En 2022, il enrichit sa production avec Lounès Matoub, symbole des Berbères et Les personnalités algériennes réhabilitées, qui dresse le portrait de cinquante figures historiques. L’année suivante, il fait paraître deux recueils bilingues : l’un sur Ahmed Lemseyyeh, l’autre sur Si Youcef Oulefki. Enfin, lors du SILA 2024, il présente quatre nouvelles œuvres : Les Poètes n At Yiraten, Le voyage de Si Mohand Ou Mhend, ainsi que deux rééditions ou compléments sur ses thèmes de prédilection. Cette somme porte à plus de vingt le nombre d’ouvrages qu’il a consacrés à la mémoire kabyle, à la poésie orale, à la langue amazighe et à l’histoire algérienne.
Dans une Algérie en quête de mémoire et de repères identitaires, l’œuvre de Mohand Ouramdane Larab prend une dimension presque politique. Elle redonne voix aux oubliés, réhabilite les résistances culturelles silencieuses et ouvre des passerelles entre générations, langues et récits. En cela, son apport n’est pas seulement littéraire ou historique, il est profondément humain.
Son impact se mesure également dans les milieux académiques et culturels, où ses travaux sont devenus des références incontournables sur l’oralité amazighe. En diffusant ces œuvres en version bilingue, il facilite leur accès au grand public tout en stimulant l’enseignement du tamazight.
Mohand Ouramdane Larab contribue ainsi activement à l’éveil identitaire amazigh et à la valorisation d’un patrimoine souvent relégué à l’oralité ou à la marginalité. Par son travail de terrain, sa rigueur scientifique et sa fidélité aux voix populaires, il a su bâtir une œuvre de transmission, de mémoire et de dignité.
Brahim Saci