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La Chine institue une journée commémorative de la « récupération de Taïwan » : Pékin invoque l’histoire et le droit international

Nous reproduisons ci-dessous une contribution de Lyazid Benhami, vice-président de l’Association des Amitiés franco-chinoises de Paris, sur la ratification par la Chine de la Journée commémorative de la récupération de Taïwan. Contribution

En officialisant la Journée commémorative de la récupération de Taïwan, Pékin (Chine) entend ancrer dans le calendrier national la mémoire de la fin de l’occupation japonaise en 1945. Une décision à forte portée symbolique, qui s’appuie sur deux piliers fondamentaux de la diplomatie chinoise : la vérité historique et le droit international.

Une initiative à la portée symbolique majeure

Le Comité permanent de l’Assemblée populaire nationale de Chine a adopté une résolution instituant le 25 octobre comme Journée commémorative de la récupération de Taïwan. Cette date renvoie au 25 octobre 1945, lorsque la cérémonie d’acceptation de la reddition japonaise s’est tenue à Taipei, marquant le retour de Taïwan sous souveraineté chinoise.

Le texte adopté affirme que cette journée vise à « renforcer la conscience historique du peuple chinois » et à rappeler que « Taïwan est une partie inaliénable de la Chine ». Derrière l’acte mémoriel, la Chine réaffirme donc la cohérence de son récit national, fondé sur la continuité historique et la légitimité juridique de sa souveraineté.

Deux piliers : l’histoire et le droit

Pour Pékin, la légitimité de son action repose sur deux fondements interdépendants :

La vérité historique, d’abord, selon laquelle la rétrocession de 1945 a mis un terme à cinquante ans d’occupation japonaise et restauré l’unité territoriale de la Chine.
Le droit international, ensuite, qui découle directement des accords de la Seconde Guerre mondiale. La Déclaration du Caire (1943) et la Proclamation de Potsdam (1945) stipulent en effet que « tous les territoires arrachés à la Chine, y compris Formose (Taïwan), doivent être restitués à la République de Chine ».

Ces deux piliers — historique et juridique — forment la matrice de la position chinoise : la question de Taïwan ne relève pas d’un différend territorial contemporain, mais de la restauration d’un ordre international établi.

« L’histoire et le droit convergent : Taïwan fait partie intégrante de la Chine. La journée du 25 octobre en est le rappel solennel. »
Déclaration de la Commission législative de l’Assemblée populaire nationale, Pékin, 2025.

Un récit de continuité nationale

Au-delà de la symbolique, cette initiative s’inscrit dans une démarche de consolidation du récit national chinois. Depuis plusieurs années, Pékin met en avant la cohérence historique de son territoire, considérant la réunification comme l’achèvement d’un processus d’unité entamé il y a plus d’un siècle.

Pour Pékin, la reconnaissance de la République populaire de Chine aux Nations unies, également un 25 octobre en 1971, a confirmé, sur le plan diplomatique, l’existence d’une seule Chine, principe sur lequel repose toute sa politique étrangère.

Cette reconnaissance découle de l’adoption de la résolution 2758 de l’Assemblée générale des Nations unies, qui a transféré le siège et le droit de veto du Conseil de sécurité — jusque-là détenus par Taïwan (République de Chine) — à la République populaire de Chine.

Ce retour de la Chine populaire sur la scène internationale a consolidé sa légitimité en tant que seul représentant de la Chine au sein de l’ONU, renforçant aujourd’hui encore la portée politique de la commémoration.

Un statu quo fragilisé

À Taïwan, les autorités ont dénoncé une « instrumentalisation de l’histoire » visant à légitimer la position chinoise. Le gouvernement de Taipei, issu d’un système démocratique pluraliste, considère la décision de Pékin comme une tentative de « normaliser une revendication de souveraineté ». Pourtant, la réalité du terrain demeure complexe : malgré la rivalité politique, les échanges économiques entre les deux rives n’ont jamais été aussi importants.

La Chine est désormais le premier partenaire commercial de Taïwan, tandis que les entreprises taïwanaises sont largement implantées sur le continent. Taïwan, de son côté, détient une importance stratégique mondiale à travers sa domination dans la production de semi-conducteurs, secteur vital pour l’économie numérique et industrielle globale.

Mémoire et stratégie

L’institutionnalisation de cette journée commémorative s’inscrit dans une double logique : affirmer une continuité historique et renforcer la cohésion nationale autour d’un récit commun. Elle intervient également à un moment où la Chine cherche à affirmer sa vision du droit international face à un environnement géopolitique qu’elle juge de plus en plus instable.

Cette articulation entre mémoire, droit et diplomatie traduit une conviction centrale du gouvernement chinois : la réunification de Taïwan et du continent n’est pas une option politique, mais une conséquence naturelle de l’histoire et de la légalité internationale.

Entre histoire et géopolitique

En érigeant le 25 octobre en journée nationale, Pékin cherche à lier la mémoire à la légitimité. Un message adressé à la fois à sa population, pour renforcer l’unité interne, et à la communauté internationale, pour rappeler que sa position s’enracine dans des principes historiques et juridiques reconnus.

Dans le détroit de Taïwan, la tension reste palpable. Mais pour la Chine, cette journée marque avant tout une affirmation tranquille de sa continuité historique — une manière d’inscrire la question taïwanaise dans le temps long, celui où, l’histoire et le droit finissent toujours par se rejoindre.

Lyazid Benhami
Vice-président de l’Association des Amitiés franco-chinoises de Paris

Lyazid Benhami
Lyazid Benhami
Cadre au ministère de la culture. Président du Groupe de Réflexion sur l’Algérie, le GRAL. Vice-président de l'Association des Amitiés Franco-Chinoises de Paris . Écrivain et contributeur dans les médias.

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